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Répertoire3.5
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Interprétation3.8
Timeless, Réa Beaumont, piano / Shrinking Planet Productions, 2018, SPP 0093
Avec Timeless, la pianiste Réa Beaumont invite des compositeurs américains et canadiens récents qui cherchent à fixer leurs œuvres dans une temporalité différente, changeante et éphémère, des réflexions sur le temps symbolisées par le pendule de Foucault à Paris qui orne la pochette.
Cet album a l’avantage de juxtaposer des pièces et des créateurs appartenant à un flot commun, ce qui permet d’en distinguer les langages propres. Ainsi, le minimalisme de John Adams évolue lentement, par ajouts, retraits et décalages, tandis que le célèbre Mad Rush (aurait-on pu entendre autre chose ?) de Philip Glass superpose des voix évoluant chacune dans son temps propre; le langage du Canadien Srul Irving Glick emprunte son lyrisme au romantisme, mais s’en démarque par l’utilisation de métriques changeantes. Le compositeur torontois Jordan Pal réalise dans Study in White une synthèse efficace et personnelle des musiques minimaliste, répétitive et impressionniste tandis que Jordan Nobles, de Vancouver, apporte une verve plus poétique et éthérée dans Zephyrus. Deux compositions de Réa Beaumont, de facture plus épurée, se glissent dans l’album. Il est très appréciable de voir plusieurs œuvres canadiennes dans ce programme varié.
La pianiste rend honneur à ce répertoire grâce à une technique solide et une interprétation habile des différents langages présents. Elle met en lumière les éléments importants et révèle le relief des lignes ou encore l’unité et la linéarité des pièces malgré des rythmiques changeantes. Le danger d’un tel album est de se laisser bercer et d’oublier que cette musique résulte d’un long travail d’appropriation des rythmes extraeuropéens, mais également de développements complexes à partir d’un matériau simple et minimal. Un album agréable et très accessible.