Pulcinella de Stravinsky : Un enregistrement historique marque un nouveau départ au TSO

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En novembre 2023, le Toronto Symphony Orchestra (TSO) a annoncé le début d’un partenariat à long terme avec Harmonia Mundi. Ce partenariat historique − le premier de l’étiquette européenne avec un orchestre nord-américain − a été inauguré avec la sortie récente de la Turangalîla-Symphonie de Messiaen, enregistrée l’année dernière, et se poursuivra avec l’enregistrement de Pulcinella de Stravinsky, les 23 et 24 février.

Les concerts débuteront avec Curiosity, Genius and the Search for Petula Clark de Kelly-Marie Murphy, une œuvre commandée et créée par l’orchestre en 2017, avec le soutien du gouvernement du Canada et de la Fondation Glenn Gould. Cette œuvre de 10 minutes, en un seul mouvement, a été écrite pour célébrer le 85e anniversaire de Gould et le 70e anniversaire de ses débuts avec le TSO. Mais, au lieu de refléter son héritage en tant que pianiste de concert, elle sert à brosser le portrait de l’homme lui-même : sa personnalité publique et privée.

Photo par Allan Cabral

Photo par Allan Cabral

Après s’être retiré de la scène publique en 1964, Glenn Gould a consacré une grande partie de son temps et de ses efforts à l’enregistrement et à la diffusion, créant une série de documentaires radiophoniques, dont le premier s’intitulait The Search for Petula Clark (La recherche de Petula Clark). Murphy utilise ces documentaires radiophoniques comme dispositif de cadrage. Sa pièce évoque la recherche par Gould de la chanson de Clark Who Am I ? à travers les stations de relais radio, lors d’une promenade en voiture dans le nord de l’Ontario. « Il parle de cette chanson pop avec la même application, la même attention et la même intelligence qu’il le ferait pour Bach », indique Murphy dans ses notes de programme. Son travail tente de capter « l’énergie, la curiosité, la réflexion et la satisfaction » de Gould, si évidentes dans cette émission de radio.

Après l’œuvre de Murphy, le concert passera à la vitesse supérieure et mettra en lumière la période néoclassique de Stravinsky : tout d’abord, la version de 1949 du Divertimento du Baiser de la fée, composé à l’origine en 1928. L’intrigue du Baiser de la fée s’inspire de La Vierge de glace de Hans Christian Andersen, tandis que la musique rend hommage à Tchaïkovski, l’un des héros d’enfance de Stravinski. Ici, Stravinsky « prend une source, la modifie [et]crée quelque chose de nouveau dans son propre langage », déclare le chef Gustavo Gimeno dans un entretien avec le TSO.

Cette approche est similaire à celle qu’il adopte dans Pulcinella. Largement considéré comme la première incursion de Stravinsky dans l’écriture néoclassique, le ballet emprunte des éléments de la commedia dell’arte italienne du XVIIe siècle à des compositeurs tels que Pergolesi, Draghi et Monza − réimaginant les thèmes et les idées musicales avec de nouveaux rythmes, de nouvelles textures orchestrales et de nouvelles harmonies.

Photo by Allan Cabral

Si la suite de Pulcinella est bien connue, le ballet est rarement joué dans son intégralité. À cette occasion, le TSO sera rejoint par la mezzo-soprano Isabel Leonard, le ténor Paul Appleby et le baryton-basse Derek Welton. Gimeno se réjouit de travailler avec ce groupe de chanteurs estimés, « c’était mon premier choix », dit-il en entrevue. C’est la première fois que le chef travaille avec Leonard, Appleby et Welton. « Ce sont de grands artistes, de grands chanteurs, individuellement, dit-il, mais au-delà de cela, c’est l’équipe que j’avais imaginée ».

Cette représentation marquera le début de plusieurs nouvelles relations musicales, mais honorera également les collaborations du passé. Le TSO, par exemple, a marqué un moment important pour Stravinsky : c’est avec ce même orchestre, en 1967, qu’il a dirigé pour la dernière fois de sa vie la suite de Pulcinella. Il est mort quelques années plus tard, en 1971, à l’âge de 88 ans.

Il va sans dire qu’un enregistrement en direct n’est pas une mince affaire et qu’il exige un niveau de préparation intense de la part de toutes les parties. Ayant dirigé son premier enregistrement avec l’orchestre l’année dernière, au cours de la saison du 100e anniversaire de l’orchestre, Gimeno est certainement prêt à diriger celui-ci. Pour les enregistrements, « tout le monde est tellement préparé, motivé et concentré, dit-il. On le sent dès la première répétition. » Il ajoute que le niveau d’attention et de concentration est tout à fait extraordinaire… « J’ai été très impressionné l’année dernière ». Gimeno entretient une relation de longue date avec Harmonia Mundi − avec qui il a déjà enregistré au Luxembourg, entre autres projets communs −, ce qui promet de simplifier le processus, en particulier en ce qui concerne la post-production.

Photo by Allan Cabral

Les musiciens sur scène ne sont pas les seuls à avoir une grande responsabilité. Les spectateurs sont tout aussi importants pour le succès d’un enregistrement en direct. Ils amèment un sentiment d’excitation et une concentration active dans la salle. « En étant présent et enthousiaste, le public apporte sa contribution », confirme Dawn Cattapan, vice-présidente et directrice générale du TSO. « L’Orchestre se nourrit de leur énergie », dit-elle.

Les concerts des 23 et 24 février seront enregistrés pour l’album. Ces enregistrements, ainsi que les sessions d’enregistrement de « patchs » après le concert, seront combinés pour créer le produit final. En coulisses, une équipe du TSO et d’Harmonia Mundi uniront leurs forces pour transformer la salle verte du Roy Thomson Hall en une « centrale d’enregistrement ». L’auvent suspendu au-dessus du public sera ajusté de manière à manipuler l’acoustique de la salle et à l’adapter aux morceaux enregistrés. La salle sera équipée de micros pour capter toutes les tonalités et couleurs de l’orchestre. Après trois ou quatre mois de mixage et de montage, suivis du processus d’approbation où les musiciens et les solistes évaluent le mixage, l’enregistrement sera prêt pour le public du monde entier.

Ceux qui ont trop hâte pour attendre jusqu’à la sortie de l’enregistrement n’ont qu’à se tourner vers ces deux soirées uniques de création musicale, au cours desquelles le TSO fera revivre les œuvres en célébrant des moments historiques de la vie de Gould, de Stravinsky et de l’orchestre lui-même.

Le TSO présentera Pulcinella de Stravinsky les 23 et 24 février au Roy Thomson Hall : https://www.tso.ca/concerts-and-events/events/stravinskys-pulcinella/

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