Critique de « M » : la couleur du souffle

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La chorégraphe Marie Chouinard vous convie à  « M », un tableau vivant et mélodique du souffle qui fait fluorescer par ses couleurs spectaculaires les douze magnifiques danseurs de la compagnie. Présenté par Danse danse, jusqu’au 4 février.

Plus de trente ans après Les trous du ciel, sa première œuvre de groupe qui utilisait déjà la respiration et la voix, Marie Chouinard renoue avec le souffle qu’elle enregistre cette fois à l’aide d’un microphone, dont le pied d’une trentaine de centimètres est déposé au sol. Torse nu, les un.e.s après les autres, les interprètes se succèdent au micro et enregistrent, sur le vif, une séquence de leur souffle d’une vingtaine secondes. La séquence est ensuite échantillonnée, puis travaillée en boucle en ajoutant successivement des sons issus de la nature (chants d’oiseaux) ou d’instruments  de musique (piano, percussions). La phrase musicale est ensuite répétée pendant quelques minutes, les danseurs l’exprimant avec force de tous leurs corps.

La très relative hauteur du micro oblige les interprètes à se livrer à certaines gymnastiques pour offrir leur souffle au public. Les positions adoptées soulignent l’aspect viscéral, primal du souffle. Un peu comme dans une rap-battle, une compétition chorégraphique dont la vedette serait cette fois la respiration, les interprètes se succèdent à l’avant-scène, permettant ainsi aux spectateurs de bien analyser l’impulsion physiologique, kinesthésique du souffle. Le spectateur a l’impression de voir un animal impérieux s’emparer d’abord des poumons et de la cage thoracique de l’interprète. Le souffle secoue ensuite les épaules et se fraye un chemin par le couloir de la trachée, s’expulsant par la bouche, secouant la tête et irradiant jusqu’aux hanches et au coccyx. Autre analogie à la joute Hip-Hop, les interprètes lèvent un bras pour signaler au Dj-régisseur le début et la fin de la séquence à enregistrer. Les concurrent.e.s se suivent, chacun.e avec sa tonalité et son originalité.

Les interprètes Paige Culley et Motrya Kozbur au début de « M ». Photo © Sylvie-Ann Paré.

Les interprètes Paige Culley et Motrya Kozbur au début de « M ». Photo © Sylvie-Ann Paré.

Exubérance des couleurs

La chorégraphe Marie Chouinard est aussi réalisatrice de films, d’œuvres de réalité virtuelle et artiste visuelle (photographies, dessins, installations). Et si « M » n’est pas le premier indice de la rencontre de ces talents, c’est la première fois que celle-ci est célébrée sur un mode aussi luminescent.

Les interprètes de la compagnie Marie Chouinard sont coiffé.e.s de perruques framboise, bourgogne et orange,. Elles et ils sont vêtu.e.s de pantalons amples de couleur vives – jaune fluorescent, fuchsia, orange. Seule, Carol Prieur, hiératique, porte un pantalon mauve et fait figure de maîtresse de cérémonie, livrant de plus un solo majestueux. La peau des interprètes semble enduite de sable volcanique; leur peau a des reflets gris bleuté et, sur le sol et le fond de la scène magenta, le contraste est de toute beauté. Marie Chouinard se lâche dans les couleurs et c’est merveilleusement surprenant, visuellement très séduisant. Il y a des moments de lumière qu’on veut retenir, celui de ce parfait turquoise, par exemple.

Le charme de « M  » réside dans sa simplicité – et dans le talent et l’humour des interprètes de la compagnie Marie Chouinard, capables de danser et aussi de composer avec leurs visages. La chorégraphe Marie Chouinard a en effet le don d’aplanir les angles, de simplifier la représentation. Il en résulte une danse d’une apparente facilité; la danse contemporaine devient joyeuse et se met à la portée de tous. Le spectateur sort de la représentation la tête pleine de couleurs à faire fondre l’hiver, un large sourire sur le visage.

« M » de Marie Chouinard. Présenté par Danse danse, jusqu’au 4 février.

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Avec la participation des danseuses et danseurs Carol Prieur, Valeria Galluccio,  Motrya Kozbur, Paige Culley, Clémentine Schindler, Luigi Luna, Jossua Collin Dufour, Adrian W.S. Batt, Celeste Robbins, Michael Baboolal, Rose Gagnol et Scott McCabe.

Musique Louis Dufort.
Lumières, scénographie, costumes et perruques Marie Chouinard.
Maquillages Jacques-Lee Pelletier.

Direction de production Jérémie Boucher.
Répétitions Lucie Vigneault, Isabelle Poirier, Tony Chong et Amy Shulman.
Assistance aux lumières Chantal Labonté.
Confection des costumes Philippe Massé.
Confection des perruques Stephane Scotto Di Cesare.
Enregistrement des voix Vincent Blain.
Assistance aux maquillages Johanne Viens.
Caméra et montage teaser Gabriel Savignac.
Photographies Sylvie-Ann Paré.
Captation vidéoRobin Pineda Gould.

Équipe de spectacle
Directeur technique Jérémie Boucher.
Répétitrices Isabelle Poirier et Kimberley de Jong.
Régisseuse lumière Chantal Labonté.
Sonorisateur Jérôme Guillaume.
Régisseur de scène Félix Lefebvre.
Aide et logistique Martin Coutu.

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