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Fuga Libera3
Lorsque John Cage est venu à Moscou au cours de l’été 1988, ce n’était pas tant une convergence des contraires qu’une validation de la prophétie de déconstruction culturelle que l’iconoclaste américain avait annoncée depuis longtemps.
Cage faisait de la musique en la décomposant, en faisant coller des disques dans un sillon, en demandant aux interprètes de tenter le coup, en faisant du silence au lieu du son. L’Union soviétique, dans sa dernière année de désintégration, était l’endroit idéal pour prêcher ses doctrines loufoques.
Cage a rencontré un jeune pianiste, Alexei Lyubimov, qui est devenu un apôtre instantané. « Nous buvions de la vodka et mangions des pissenlits », se souvient Lyubimov. Il est subjugué par Four Walls, une œuvre pour piano et voix occasionnelle, créée pour un ballet de Merce Cunningham.
La musique, semblable à une transe, évolue par degrés imperceptibles vers la transcendance. La voix, lorsqu’elle se fait entendre de façon distante au début du deuxième acte, s’immisce à peine dans le sentiment statique de bien-être vague qu’a suscité le gourou Cage.
Tiré d’une performance tardive dans un festival, l’admirable Lyubimov joue Four Walls avec une dévotion immersive. Au bout d’un moment, l’auditeur perd toute notion du temps et en est reconnaissant. Les murs du titre sont dénotés par leur absence. C’est une musique sans limites d’espace, une zone totalement libre, merveilleuse et plus qu’un peu folle.
NL
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