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Hyperion4
L’année du 70e anniversaire de la mort de Hans Pfitzner (1869-1949) est marquée par le retour d’un concerto pour piano qu’il avait écrit au sommet de sa gloire. Pfitzner, acclamé pour son opéra de 1917, Palestrina, avait livré ce concerto en 1923, avec Walter Gieseking comme soliste. Si Palestrina fait écho au Meistersinger de Wagner, le concerto incline fréquemment vers le si bémol de Brahms – et l’inclination dépend surtout de l’auditeur.
La réputation déchue de Pfitzner est parfois attribuée à son écœurante sympathie pour les nazis, mais ce concerto suggère que la faute pourrait être attribuée à quelque chose de propre à la musique elle-même. Chacun des quatre mouvements commence par une idée prometteuse, qui se perd rapidement dans un monceau de verbiage grandiloquent. J’ai rarement entendu un morceau si éparpillé, si confus et sans dessein qu’on est porté à regarder sa montre (encore 40 minutes) et que l’oreille prie pour une trêve.
J’ai jonglé avec l’idée que le soliste Markus Becker et le chef d’orchestre Constantin Trinks suivaient peut-être un tempo erroné ou, pire, qu’ils surestimaient Pfitzner comme lui-même se surestimait. Mais le deuxième concerto sur cet enregistrement de l’étiquette Hyperion montre qu’ils sont des interprètes habiles et sensibles d’une musique écrite par un compositeur de stature décidément supérieure.
Walter Braunfels (1882-1954), qui vivait tranquillement à Cologne, a vu interdire sa musique sous le IIIe Reich pour des motifs raciaux (moitié juif) et religieux (dévot catholique). Un morceau pour orchestre avec piano obbligato qu’il a écrit en 1933-1934 pour le ranger dans un tiroir a refait surface tout dernièrement, en 2017, dans les archives familiales. Cette œuvre postromantique, avec son curieux clin d’œil à Hindemith, représente la méditation d’un soliste solitaire dans une société de masse qui déraille. Il y a une tension dans le dialogue et une raideur dans la structure, avec cinq mouvements contrastés et une fin en la majeur étonnamment enjouée. Bruckner et Mahler sont les influences principales, mais Braunfels est son propre maître et sait comment retenir l’attention. Nos orchestres les plus audacieux devraient vraiment se pencher sur cette heureuse découverte.
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Traduction par Andréanne Venne
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